DE LA VILLE DE PARIS.
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pandu sur icelle; et au devant de l'autel ung pontife ayant une mittre en teste, vestu d'habitz sacerdo­taux, tenant en l'une de ses mains ung agneau prest à immoler, et en l'autre ung gros caillou, duquel il estoit prest à frapper l'agneau, comme disant que, tout ainsi que le vin de ceste couppe est respandu en terre, et cest agneau prest à immoler, puisse estre respandu le sang et immolé le corps de celluy qui contreviendra, en sorte que ce soit, aux pasches(sic) et convenances de cest edict de pacification.
Aux quatre coings de l'autel y avoict des boucles que quatre hommes 11) armez tenoient, pour ce que il n'estoit permis, au temps passé, aux prophanes de mettre la main sur la table de l'autel; lesquelz quatre hommes armez représentaient les quatre mareschaulx de France, commis et depputez pour l'execution et entretenement de cest eedict. Au bas duquel autel estoit escript :
FOEDUS IMMORTALE.
et au bas du tableau ces deux vers d'Homère : ônnôTEPOi npôTEPOi tnÈp ôpxia uhméneian,
j3aE t®' ÈrKÉOAAOS XAMÂAIX PÉO1, i-S ÔAE OÏ-
[NOSC».
sur lesquelz ont esté faictz ces vers françoys:
Tout ainsy qub ce vin est respandu en terre, Puisse estre despandu le sang et lecerveau,
Et LE CORPS IMMO, AU LIEU DE CEST AGNEAU,
De CELUY QUI VOULDRA RENOUVELER LA GUERRE.           [B]
En l'autre costé, estoit ung tableau double, dans lequel estoient forces corceletz, morions, gantelez, rondaches et aultre sorte d'armes, parmy lesquelles les abeilles faisoient leur cire et miel, signiffiant qu'il n'est plus besoing d'armes en France, estant cest eedict de paciffication bien entretenu. Et des­soubz estoient ces deux vers d'Ovide :
aspice felici l.stentur ut omnia pace ; Arma cruor tinxit, nunc ea melle madent '->.
Et plus bas, à mesme fin, pareilles sortes d'armes,
èsquelles les aragnes faisoient leurs toilles, et des­soubz ces vers de Theocrit :
. .. APÂXNIA A' ElS ÔIU' ÂPAXNAI AEnTÀ AIASTH2.AINTO, BOAS A' ETI MHA' ÔNOM'
[EÏH <->.
comme voullant dire :
Ll LES ARAGNES FONT DANS LES ARMES LEURS TOILLES,
Signe de seure paix et oubly de querelles.                [R]
Dont s'ensuyvra, Dieu aydant, une bonne admi­nistration de justice, affin de restablir et remettre toutes choses en leur ancien estat, soubz l'obeissance du Roy, telle qu'elle luy est deue, et d'autant plus qu'il est pere du peuple et Roy très veritable, estably de Dieu pour rendre la justice egallement, tant au grand qu'au petit, et que tout ainsi que par son eedict de pacification nous a faict apparoir de sa clé­mence et pieté, representée en l'une des coulonnes de sa devise, s'efforcera par sa justice, representée en l'aultre colonne d'icelle devise, à nous maintenir en repos et reunir et incorporer tous ensemble en son obeissance.
Voilla en somme quelle fut l'invention et intelli­gence des ouvraiges susdictz. Reste à venir au faict et ordre qui fut tenu à ladicte entree.
[IlI. —• LES CÉRÉMONIES, LE CORTÈGE W.]
- Le mardy, sixiesme jour de Mars mil cinq cens soixante unze, le Roy arriva, environ dix heures du matin, au prieuré Sainct Ladre, assis aulx faulxbourgs Sainct Denys; auquel lieu luy avoit esté dressé ung eschaffault près le logis du Prieur, tant affin de veoir passer les compagnies des estatz de lad. Ville, que pour ouyr et recepvoir les harengues et salutations qui luy seroient faictes de la part d'iceulx. Et affin que n'y eust aulcun desordre, estoient deulx grands escaliers, l'ung pour monter et l'aultre pour des­cendre de cest eschaffault, lequel estoit couvert de riche tapisserie, et au milieu dressé ung hault dais de trois marches, couvert de tapisserie de Tur-
el Var. "boucles de quatre hommes» (A).
<-' Homère, Iliade, liv. 111, vers 2gg-3oo.
(-) Lés excellentes tables de la collection des classiques latins de Lemaire, que nous avons consultées en vain pour retrouver ce distique, nous permettent d'affirmer presque à coup sûr que l'échevin Bouquet se trompe; ces deux vers ne sont pas d'Ovide.
C Théocrite, Idylles, liv. XVI, vers 96-97.
<5) Outre les relations imprimées que nous avons signalées ci-dessus (page 263, note 2), celte troisième partie a été aussi publiés entièrement par Dom Félibien, Histoire de la Villedé Paris, in-folio, 1725, tome V (Preuves, t. III), pages 4o6-444 , et par Godefroy, Le Cérémonial françois, Paris, in-4°, 1619, pages 483 et suiv.; et Paris, 2 vol. in-folio, 1649, tome I, pages 519 et suiv.